Le samedi 10 Février, des rumeurs ont circulé dans le milieu du football béninois concernant une scène de mésentente entre le coach André Landeut et ses joueurs. Selon ces rumeurs, les joueurs auraient expulsé le coach du camp d’entraînement de l’Adjidja FC à Toffo.
Dans une interview exclusive accordée à 229Foot, le coach belge-congolais démystifie la situation et fait une importante annonce concernant son avenir à la tête du club des forces armées béninoises.
Bonjour coach. Une rumeur annonce que vos joueurs vous ont refusé l’accès au camp d’entrainement d’Adjidja FC ce samedi. Que s’est-il réellement passé ?
André Landeut : Il ne s’est rien passé de grave. Il s’agissait d’un entraînement que j’ai observé, car parfois je préfère observer et laisser mes assistants animer la séance, ce qui permet d’obtenir de précieux enseignements. Après la séance, il y a toujours un rassemblement pour un débriefing. J’ai appris qu’une personne de la direction aurait appelé quelqu’un pour lui dire de ne pas écouter le coach. J’ai alors informé les garçons que cela pourrait être notre dernière séance ensemble.
Ensuite, nous avons pris des photos, tout cela dans une ambiance détendue. Je peux vous assurer que personne ne m’a chassé. Qui aurait pu faire une telle chose ? Certainement pas les joueurs. Où avez-vous déjà vu des joueurs chasser un coach ? Depuis quand des élèves peuvent-ils chasser un professeur de la classe ?
Si cela s’est réellement passé, ce serait une honte pour Adjidja, ce serait ridicule. Et ce sont des choses à ne pas dire. Il est déjà ridicule et honteux d’inventer une telle histoire, publiée par un inconnu. C’est simplement un acte impulsif et irresponsable visant à nuire à ma réputation.
Alors, comment décririez-vous l’ambiance entre vous et vos joueurs depuis votre arrivée, et malgré la non-qualification en Super Ligue Pro ?
A.L : L’atmosphère et les relations que j’entretiens avec tous les joueurs sont extrêmement harmonieuses au sein de ce groupe solidaire. Bien qu’il arrive parfois des malentendus et des désaccords, ce qui est inévitable dans un groupe passant autant de temps ensemble, nous parvenons toujours à en discuter et à trouver des solutions. Cette solidarité et cet attachement au sein de l’équipe me procurent un réel plaisir à travailler avec eux.
Un jour, alors que j’étais malade souffrant de paludisme, certains joueurs sont venus chez moi. Ils se sont installés près de mon lit avec empathie et m’ont encouragé à manger un peu. Cet acte témoigne de la solidarité que l’on peut vivre en Afrique. Malgré ma réputation de coach charismatique et parfois exigeant, avec certains joueurs, j’ai une relation de type père-fils, tandis qu’avec d’autres, c’est plutôt comme entre un grand frère et un petit frère.
Tout le monde connaît ma maison, et parfois, les joueurs viennent y passer du temps, partager des repas et plaisanter. Mais sur le terrain, ils savent que je suis très exigeant, et ils répondent bien à mes attentes. Si vous le souhaitez, je peux vous envoyer nos échanges pour illustrer cela. En gros, nos relations sont vraiment bonnes.
Nous étions tous déçus, joueurs et staff, de ne pas avoir atteint l’objectif de nous qualifier en Super League Pro. Surtout après que j’ai négocié avec les dirigeants une prime d’objectif pour chacun en cas de qualification. Cependant, notre déception s’est amplifiée lorsque le DGD Sosthène Seflimi a déclaré que ce n’était pas réellement notre objectif et que nous ne méritions pas mieux que la cinquième place. Il a également justifié l’abandon de la Super League en raison de son coût élevé pour le club. Depuis cette annonce, il semble ne pas réaliser qu’il y a un désaccord croissant entre lui et moi. Je lui ai clairement exprimé que je ne supporte pas l’échec.
Aujourd’hui, quelle est la nature de vos relations avec les responsables du club ?
A.L : À l’origine, nos relations étaient courtoises et professionnelles. Parmi les dirigeants, je ne connais que deux personnes : DGD Sosthène Seflimi et DS Magloire Tchetchao. Ce sont mes supérieurs hiérarchiques, même si le DS n’a pas les mêmes qualifications que moi. Malgré cela, je fais preuve d’humilité et le reconnais comme DS. Même si je suis moi-même un directeur sportif, j’ai déjà rempli ce rôle dans ma carrière, en cumulant également la gestion d’une académie. Je comprends que le DS ici ne fait pas cela comme son premier métier, car il est major dans l’armée.
La preuve en est qu’il n’a jamais assisté à une seule séance d’entraînement depuis que je suis là. Bien qu’il soit important pour un directeur sportif d’assister aux entraînements, pour moi, cela ne posait pas de problème. Je pensais que j’étais là pour gérer et alléger leur charge de travail, donc je m’attendais à avoir la pleine confiance et le libre cours de mes supérieurs, car je suis celui qui possède l’expertise en football.
Je pensais former un trio avec eux deux, être également membre de la direction et même le moteur de ce club. Cependant, j’ai constaté qu’ils pensaient qu’un entraîneur ne travaille qu’une heure par jour, alors que moi, je travaille de 7h à 23h. Mon travail ne se limite pas aux séances d’entraînement ; il inclut la préparation, la planification, l’étude tactique, l’observation des adversaires, les déplacements pour regarder des matchs, et même la détection des joueurs, en déléguant certaines tâches à mes assistants.
Progressivement, notre relation est devenue toxique et néfaste. Mes supérieurs tenaient des propos contradictoires par rapport à ma vision en tant qu’entraîneur. Par exemple, le chef du matériel, qui est sergent dans l’armée, aurait été leur « œil ». Cela ne me plaisait pas d’entendre cela, car c’est le rôle du coach d’être garant des résultats et de la discipline. Leur « œil » aurait dû être moi, car ils ne comprennent pas que je suis un civil, un éducateur, un manager sportif, un cadre supérieur dans le domaine sportif. Être surveillé par un sergent sur un terrain de football, compte tenu de ma carrière, je trouve cela complètement absurde.
Coach, vous envisagez de démissionner après seulement trois mois en poste. Quels sont les motifs derrière cette décision ?
A.L : Travailler à Adjidja FC en tant qu’entraîneur professionnel est tout simplement impossible dans les conditions actuelles, qui sont toxiques et néfastes. Un exemple frappant de ces conditions est le fait qu’Adjidja soit le seul club au monde à ne pas fournir d’eau lors des séances d’entraînement, obligeant les joueurs à acheter de l’eau au campement avec leur propre argent.
De plus, en ce qui concerne le recrutement, j’ai souhaité recruter deux ou trois joueurs de haut niveau, mais cela s’est révélé impossible en raison de contraintes financières telles que l’incapacité du club à payer les billets d’avion nécessaires pour ces transferts. J’ai alors proposé une politique de recrutement axée sur le talent local, en mettant en avant les jeunes joueurs béninois.
Cependant, la direction a insisté pour tester des joueurs venant du Nigeria et de la Côte d’Ivoire, une approche que je ne soutiens pas car elle ne garantit pas une évaluation objective des joueurs. Malgré mes recommandations, des jeunes joueurs béninois que j’avais repérés ont été exclus de la liste de recrutement. De plus, le directeur sportif a unilatéralement envoyé un joueur qui n’était pas sur la liste, ce qui soulève des préoccupations quant à la prise de décision autoritaire au sein du club.
En résumé, je critique le fonctionnement dictatorial du club, qui va à l’encontre des principes de gestion d’une équipe de football. Bien que le club soit affilié à l’armée, il est important de souligner que ce sont les dirigeants qui sont militaires, tandis que les joueurs sont civils.
Pourtant, le projet Adjidja FC semblait très prometteur pour vous. Pensez-vous qu’il soit encore possible de le redresser avec votre implication ?
A.L : Le projet Adjidja semblait effectivement prometteur et intéressant. À mon arrivée, j’ai accepté un salaire modeste, presque bénévole, car j’étais séduit par le slogan « Adjidja FC parmi les grands ». J’ai vu l’opportunité de grandir avec un club béninois, de professionnaliser l’équipe, de former des jeunes joueurs et de viser haut. Après notre non-qualification en Super Ligue Pro, j’ai encouragé les joueurs à se concentrer sur le championnat de Ligue Pro Suite.
Cependant, le club a pris la décision de se séparer de 9 joueurs sur 26, prétendant pouvoir continuer avec seulement 16 joueurs. Pourtant, à ce jour, aucun recrutement n’a été effectué et le mercato touche à sa fin. Cette situation me semble irrécupérable.
J’ai un contrat jusqu’en juillet 2025, mais il semble que tous les joueurs seront libres en juin. Cette gestion amateurisme nuit à l’équipe, et je crois qu’il est impossible de redresser la situation. Il est regrettable que la direction ne réalise pas l’impact de leurs actions sur l’équipe et cherche à dénigrer ma réputation en cas de démission.